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Glazoué, Bénin le 28 janvier 2020―l’Agitation qui règne dans le joli bâtiment en face de la gare d’Agouagon contraste avec le calme plat de l’édifice ferroviaire complètement à l’abandon. Une dizaine de femmes s’active autour d’un four artisanal, déversant du riz non décortiqué précuit dans de grandes bassines avant de le faire sécher plusieurs jours et de l’acheminer au centre-ville de Glazoué être décortiqué et trié. Bienvenue à la coopérative des femmes étuveuses d’Agouagon qui tente de redonner un second souffle à une bourgade en quête de dynamisme, à près de quatre heures de route de Cotonou.
« Nous nous sommes installées ici dans l’espoir que le train, point névralgique des activités agricoles du village, allait revenir », confie Cyprienne Dossou, présidente de la coopérative, médusée par la désaffectation de la gare. « Nous sommes 17 membres, toutes agricultrices et depuis cinq ans, nous faisons de l’étuvage sur une parcelle commune de deux hectares, indépendamment de nos champs personnels. Nous achetons aussi du riz paddy auprès d’autres producteurs pour le transformer. »
« Avant, il fallait mobiliser au moins quatre femmes pour trier manuellement un sac de 100 kg et cela prenait une journée tandis que la trieuse que nous avons installée a un rendement de 1,4 tonne par heure », Bertin Adéossi, Coordonnateur du programme cadre d’appui à la diversification agricole
Une filière très féminisée
Plus nourrissant et particulièrement prisé par la clientèle nigériane, le riz étuvé représente une opportunité économique pour de nombreuses femmes de la région. Dans ce département des Collines au centre du Bénin, elles sont des centaines à s’être spécialisées dans cette technique de transformation pour améliorer leurs revenus. Réunies au sein de l’Union des femmes étuveuses de riz des Collines (UFER-C), elles ont bénéficié de l’appui du Projet d’appui à la diversification agricole (PADA) et du Projet de productivité agricole en Afrique de l’Ouest (PPAAO) financés par la Banque mondiale. « Nous avons suivi une formation gratuite sur les techniques d’étuvage du riz », explique Léontine Batcho, présidente de l’Union. « Nous avons aussi obtenu du matériel informatique et de bureau, des mobylettes et des tricycles pour nous aider à développer notre activité. »
À elle seule, l’UFER-C compte aujourd’hui près de 800 étuveuses réunies au sein de 67 coopératives villageoises. Une tendance qui n’est pas près de s’inverser pour Léontine : « La main d’œuvre est en pleine expansion, les coopératives enregistrent régulièrement de nouvelles adhésions. » Signe que le riz étuvé monte en puissance, son taux de décorticage au Centre de traitement et de distribution de Glazoué est passé de 10 à 35 % en deux ans.
La mise en place, d’un système de crédit au sein de l’Union pour aider les agricultrices à préfinancer l’achat de riz paddy (non décortiqué) explique aussi ce succès. « L’UFER- C nous a permis de nous organiser, de mutualiser nos efforts et de saisir les opportunités », souligne Odette Agossou, présidente de l’Union communale des femmes étuveuses de riz de Glazoué et administratrice de l’UFER-C. « Aujourd’hui, l’étuvage me donne tout, j’ai des parcelles, j’ai un moyen de déplacement et j’arrive à subvenir aux besoins de mes enfants. »
À elle seule, l’UFER-C compte aujourd’hui près de 800 étuveuses réunies au sein de 67 coopératives villageoises. Photo : Gnona Afangbedji, Banque mondiale
Un riz de meilleure qualité grâce à des installations plus modernes
Ce qui fait surtout la fierté des femmes étuveuses de riz des Collines, c’est l’installation par le projet d’une trieuse optique pour améliorer la qualité du riz. « Ça a révolutionné notre travail », insiste Paulin Honaï, gestionnaire du Centre de traitement final et de distribution. « La trieuse nous permet d’avoir du riz parfait, sans déchets et de garantir la qualité de notre label sur le marché. »
Implantée au Centre de traitement final et de distribution de Glazoué, la machine est co-gérée par l’UFER-C et l’Union des producteurs de riz des Collines (Uniriz). La plupart du riz paddy cultivé dans le département converge ainsi vers cette mini-usine de traitement pour être étuvé et commercialisé sous le label Saveur des Collines.
Pour Bertin Adéossi, coordonnateur du programme cadre d’appui à la diversification agricole (PROCAD), cette modernisation a aussi l’avantage de remplacer l’étape pénible du tri manuel : « Avant, il fallait mobiliser au moins quatre femmes pour trier manuellement un sac de 100 kg et cela prenait une journée tandis que la trieuse que nous avons installée fournit un rendement de 1,4 tonne par heure, ce qui permet à l’union de transformer près de 10 tonnes de riz par semaine », confie-t-il.
La production est en constante augmentation, elle est passée de 32 tonnes en 2016, à 201 tonnes en 2017 et 303 tonnes en 2018 et devrait atteindre 800 tonnes en 2019. Une performance qui se reflète sur le chiffre d’affaires qui a augmenté de 33 millions à près de 80 millions francs CFA entre 2017 et 2018.
Le prochain objectif du centre ? Augmenter sa capacité de décorticage qui ne couvre actuellement que 10 % du riz produit dans les Collines. « Malgré la présence de la trieuse optique, nous avons des difficultés avec notre production depuis la fermeture de la rizerie publique de Glazoué », déplore Faustin Assomavè, président de l’Union régionale des riziculteurs des Collines (UNIRIZ). « Aujourd’hui, beaucoup de producteurs et aussi des femmes étuveuses sont obligés de brader leur riz paddy ou leur riz étuvé aux commerçants nigérians. »
Mis en œuvre dans quatre pays d’Afrique de l’Ouest (Bénin, Guinée, Niger et Togo), le PPAAO vise à générer et accélérer l’adoption de technologies améliorées dans des filières agricoles. Au Bénin, le PPAAO a bénéficié d’un financement de 20 millions de dollars de l’Association internationale de développement. En juillet 2019 quelque 753 387 producteurs dont 40 % de femmes aveint bénéficié d’un soutien direct du projet.
Le prochain objectif du centre ? Augmenter sa capacité de décorticage qui ne couvre actuellement que 10 % du riz produit dans les Collines. Photo : Gnona Afangbedji, Banque mondiale
Credit @ Banque Mondiale